L’arrivée de l’intelligence artificielle (IA) s’accompagne d’un lot de réflexions inquiètes ou optimistes. Amie ou ennemie, rêve ou danger? La fiction, en littérature et au cinéma, explore les multiples visages de l’IA, faisant émerger une question : que dit l’IA de ce que nous sommes?
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L’IA et la création
Une préoccupation actuelle au sujet des relations entre l’IA et la fiction concerne l’écriture même des livres : le futur de la littérature appartient-il à l’IA? Celle-ci remplacera-t-elle les écrivaines et les écrivains?
Dans Ada, Antoine Bello imagine une IA développée pour écrire des romans sentimentaux dans le but unique de gagner de l’argent. Sa disparition donne lieu à une enquête policière qui interroge les valeurs des créateurs des intelligences artificielles dans la Silicon Valley. Dans la pièce Wollstonecraft, Sarah Berthiaume, quant à elle, met en scène un poète qui écrit à partir de vers générés par un algorithme. Du côté des jeux vidéo, The Talos Principle met en scène une IA divine qui impose au joueur une multitude de puzzles dans un monde entièrement créé par elle.
Roman
Ada, d’Antoine Bello, 2016
Pièce de théâtre
Wollstonecraft, de Sarah Berthiaume, 2023
Jeu vidéo
The Talos Principle, Croteam, 2014
Alan Turing ou une histoire de l’IA
Ce sont les travaux du mathématicien Alan Turing qui, au milieu du XXe siècle, ont posé les bases de la recherche en informatique et en IA. Entre sa contribution majeure au décryptage de la machine Enigma utilisée par l’armée allemande durant la Deuxième Guerre mondiale et la mise au point du fameux test de Turing (sur la possibilité d’imiter l’intelligence humaine), le scientifique est aussi connu pour avoir été stigmatisé en raison de son homosexualité. Son histoire est le sujet d’un roman écrit par Jacques Marchand et d’un film de Morten Tyldum. Elle fait aussi partie de la fresque que propose Louisa Hall dans un roman qui, à travers une histoire de l’IA s’étendant de 1663 à 2040, propose une réflexion sur ce qui fait de nous des êtres humains. Quant au test de Turing, il est au cœur du film Ex Machina d’Alex Garland.
Romans
Rêves de machines, de Louisa Hall, 2017
La joie discrète d’Alan Turing, de Jacques Marchand, 2019
Films
Ex Machina, d’Alex Garland, 2014
Le jeu de l’imitation (The Imitation Game), de Morten Tyldum, 2014
Nos amis les robots
La création de compagnes ou de compagnons parfaits dotés d’une IA est un thème récurrent dans les œuvres de fiction. Attachants, compréhensifs et d’une fidélité sans faille, les androïdes auraient le potentiel de bouleverser nos rapports interpersonnels. Conçue à notre image, l’intelligence des robots est-elle vouée à renforcer nos pires défauts ou, au contraire, à nous surpasser en nous abandonnant à nos imperfections? Leur ressemblance avec les humains soulève ce soupçon d’inquiétude : les androïdes prendront-ils notre place? On peut aussi se demander si le véritable enjeu serait plutôt la nécessité de protéger les robots de compagnie contre ceux qui seraient tentés de les exploiter et d’en faire les nouvelles victimes de la xénophobie.
Romans
Une machine comme moi, d’Ian McEwan, 2019
Klara et le soleil, de Kazuo Ishiguro, 2021
La seule chose qui intéresse tout le monde, de François Blais, 2021
La vallée de l’étrange, de J. D. Kurtness, 2023
Films
Les épouses modèles (Stepford Wives), de Bryan Forbes, 1975
Intelligence artificielle (A.I.: Artificial Intelligence), de Steven Spielberg, 2001
Robot & Frank, de Jake Schreier, 2012
Elle (Her), de Spike Jonze, 2013
Blade Runner 2049, de Denis Villeneuve, 2017
Ron ne va plus (Ron’s Gone Wrong), de Sarah Smith et Jean-Philippe Vine, 2021
M3GAN, de Gerard Johnstone, 2022
Jeu vidéo
Detroit: Become Human, Quantic Dream, 2018
Jeux de pouvoir
Notre ambivalence face à l’IA repose sur des incertitudes : qui la développe? À qui appartient-elle? Quel usage en fait-on? Laissée entre les mains des personnes à qui profitent déjà les pouvoirs politiques et économiques, l’IA risque de reproduire les biais des groupes qui les créent et les utilisent, et d’aggraver les injustices. On imagine déjà un avenir où elle est instrumentalisée, devenant ainsi un nouveau bouc émissaire pour les machinations humaines. Une tension existe entre une vision du futur où l’IA serait au service de pouvoirs autoritaires, et celle où l’expérience humaine se verrait libérée de ses contraintes grâce à son développement.
Romans
Les marteaux de Vulcain, de Philip K. Dick, 1960
Des larmes sous la pluie, de Rosa Montero, 2013
Frankissstein, de Jeanette Winterson, 2021
Valide, de Chris Bergeron, 2021
Vandales, de Chris Bergeron, 2023
Dissident, de Jean-Pierre Gorkynian, 2023
Films
Alien : le huitième passager (Alien), de Ridley Scott, 1979
Blade Runner, de Ridley Scott, 1982
Morgane (Morgan), de Luke Scott, 2016
Créateur (Creator), de Gareth Edwards, 2023
Mission : Impossible – Bilan mortel – Première partie (Mission: Impossible – Dead Reckoning – Part one), de Christopher McQuarrie, 2023
Humains 2.0
L’humain aime penser qu’il est au sommet de la chaîne alimentaire et avoir le contrôle sur son environnement. Être un cyborg pour être plus fort, plus rapide, plus efficace : voilà un rêve auquel pourrait aspirer l’être humain. Profiter de composants mécaniques ou robotiques destinés à étendre ses capacités n’est pas si fou. Garder le contrôle sur la technologie est un scénario plus rassurant que de la laisser s’autonomiser grâce à une IA. Celle-ci pourrait facilement surclasser l’humain. En effet, on dit souvent de l’humain que ses principales faiblesses sont ses sentiments et ses émotions, alors que l’IA ne fait que des calculs. Toutefois, les auteurs semblent souvent penser naïvement que nos faiblesses seront également notre force et qu’elles feront de nous des êtres supérieurs aux androïdes…
Romans
Les employés, d’Olga Ravn, 2019
Le magicien quantique, de Derek Künsken, 2020
Pièce de théâtre
Post humains, de Dominique Leclerc, 2019
Films
RoboCop, de Paul Verhoeven, 1987
Les robots (I, Robot), d’Alex Proyas, 2004
Avengers: l’ère d’Ultron (Avengers: Age of Ultron), de Joss Whedon, 2015
Reprogrammé (Upgrade), de Leigh Whannell, 2018
Jeux vidéo
Deus Ex: Human Revolution, Eidos-Montréal, 2011
Deus Ex: Mankind Divided, Eidos-Montréal, 2016
Cyberpunk 2077, CD Projekt Red, 2020
La moralité de l’IA : une question de survie
Et si on perdait le contrôle? Cette crainte habite l’imaginaire collectif depuis longtemps, comme en témoignent les nombreuses œuvres où la survie de l’IA passe par la destruction des humains. Que ce soit par la prise de contrôle des armes nucléaires ou de nos ressources, la moralité de la machine, souvent caractérisée par sa froideur et l’ampleur de ses capacités, donne froid dans le dos. Au jeu des probabilités et des prédictions, une telle entité aura toujours plusieurs coups d’avance sur notre espèce.
Romans
Robogenesis, de Daniel H. Wilson, 2017
L'algorithme du cœur, de Jean-Gabriel Causse, 2019
Chiens de guerre, d’Adrian Tchaikovsky, 2019
Films
2001 : l’odyssée de l’espace (2001: A Space Odyssey), de Stanley Kubrick, 1968
Le cerveau d’acier (Colossus: The Forbin Project), de Joseph Sargent, 1970
Le monde de l’Ouest (Westworld), de Michael Crichton, 1973
Terminator (The Terminator), de James Cameron, 1984
La matrice (The Matrix), de Lana et Lilly Wachowski, 1999
WALL-E, d’Andrew Stanton, 2008
Les Mitchell contre les machines (The Mitchells vs. the Machines), de Mike Rianda, 2021
Jeux vidéo
Horizon Zero Dawn, Guerrilla Games, 2017
Horizon Forbidden West, Guerilla Games, 2022
L’IA venue d’ailleurs
Si une IA faite à notre image peut sembler menaçante pour notre existence, celle qui est extraterrestre l’est encore davantage. Il est facile d’imaginer une entité supérieure à la nôtre en matière d’intelligence et de force militaire. Une telle forme de vie serait-elle nécessairement hostile? L’intelligence n’irait-elle pas plutôt de pair avec la bienfaisance? L’espèce humaine sera-t-elle accueillante ou sur la défensive? La menace d’une IA extraterrestre sert de métaphore à la volonté de l’espèce humaine de dominer : qu’il s’agisse du sort que réserve l’humanité à son environnement ou un groupe d’humains à un autre.
Romans
2001 : l’odyssée de l’espace, d’Arthur C. Clarke, 1968
Un feu sur l’abîme, de Vernor Vinge, 1992
Involution, de Johan Heliot, 2014
Films
Le jour où la Terre s’arrêta (The Day the Earth Stood Still), de Robert Wise, 1951
Le géant de fer (The Iron Giant), de Brad Bird, 1999
L’oubli (Oblivion), de Joseph Kosinski, 2013
Jeu vidéo
NieR: Automata, PlatinumGames, 2017
Autres romans à lire
Expiration, de Ted Chiang, 2020
Sidérations, de Richard Powers, 2021
Immortel : le premier être humain immortel est déjà né, de J.R. dos Santos, 2020
Autres films à voir
Metropolis, de Fritz Lang, 1927
Alphaville, de Jean-Luc Godard, 1965
L’amie mortelle (Deadly Friend), de Wes Craven, 1986
Ghost in the Shell (Kokaku Kidotai), de Mamoru Oshii, 1995
Moon, de Duncan Jones, 2009
Les nouveaux héros (Big Hero 6), de Don Hall, 2014
Le monde de demain (Tomorrowland), de Brad Bird, 2015
L’homme libre (Free Guy), de Shawn Levy, 2021
À quoi ressemblera l’avenir de l’IA? Parce qu’elles aident à l’imaginer, les œuvres de fiction appellent à nous responsabiliser dans son utilisation. Reste à espérer un monde où les machines et les humains vivront en harmonie.