La saison des prix littéraires 2022

Bon nombre de prix récompensant l’excellence en littérature sont remis à l’automne, avec les moments forts que sont, par exemple, l’attribution du Goncourt, du Nobel, du Grand Prix du livre de Montréal et des Prix du Gouverneur général. Ce tour de piste dresse le bilan de la saison.

Littérature Livres
Illustration : un trophée dont semblent sortir les livres primés.
Illustration : BAnQ

Au Québec et au Canada

Prix Gilles-Corbeil 

Remis tous les trois ans depuis 1990 par la Fondation Émile-Nelligan, le prix Gilles-Corbeil est l’une des plus prestigieuses récompenses attribuées à un auteur ou à une auteure pour l’ensemble de son œuvre. Cette année, c’est l’écrivaine féministe phare Nicole Brossard qui a remporté les honneurs.

Athanase-David  

Depuis 1968, le prix Athanase-David récompense annuellement l’ensemble de l’œuvre d’un écrivain ou d’une écrivaine. Il fait partie des Prix du Québec et représente la plus haute distinction remise par le Gouvernement du Québec à une personne qui a marqué la littérature québécoise. Pour la première fois depuis sa création, c’est un bédéiste qui a été honoré cette année, l’auteur de la série Paul, Michel Rabagliati

Grand Prix du livre de Montréal 

Remis à une œuvre parue récemment et visant « à promouvoir l’excellence en création littéraire et à souligner le dynamisme du milieu montréalais de l’édition », le Grand Prix du livre de Montréal a récompensé cette année le recueil de textes poétiques The Good Arabs, d’Eli Tareq El Bechelany-Lynch. Publié par l'éditeur anglo-montréalais Metonymy Press, le livre, émaillé de mots en français et en arabe, s’inspire du vécu de Tareq el Bechelany-Lynch, une personne trans d’origine arabe. Depuis la création du prix en 1965, il s’agit de la deuxième fois seulement qu’un titre en anglais est primé. 

Prix Alain-Grandbois, Ringuet et Marcel-Dubé

L’Académie des lettres du Québec honore trois œuvres littéraires chaque automne. Le prix Alain-Grandbois de la poésie a été remis au recueil Quand je ne dis rien je pense encore, de Camille Readman Prud’homme. Le prix Ringuet pour le roman a été décerné à Alain Farah pour Mille secrets, mille dangers. Enfin, le prix Marcel-Dubé a honoré la pièce de théâtre Ravages de Danièle LeBlanc.

Prix du Gouverneur général 

Les Prix du Gouverneur général figurent parmi les principales récompenses littéraires décernées au Canada. Du côté francophone, Alain Farah a remporté les honneurs de la catégorie Romans et nouvelles avec son déjà très remarqué Mille secrets, mille dangers, publié au Quartanier. En poésie, l’autrice innue Maya Cousineau Mollen s’est démarquée avec son recueil Enfants du lichen, publié aux éditions Hannenorak, dans lequel elle aborde l’importante question du devoir de mémoire. Du côté anglophone, notons la consécration de l’autrice torontoise Sheila Heti pour son roman Pure colour. Heti avait été révélée au grand public par son roman autobiographique Motherhood (La mère en moi) en 2018. Soulignons également l’essai autobiographique d’Eli Baxter Aki-wayn-zih, auteur anichinabé et survivant du système des pensionnats autochtones. 

Les autres lauréats

En français : 

En anglais : 

Prix Giller

Créé en 1994 par l’homme d’affaires d’origine montréalaise Jack Rabinovitch en hommage à son épouse, Doris Giller, décédée l’année précédente, le prix Giller compte parmi les plus prestigieux offerts au Canada. Assorti d’une généreuse bourse de 100 000 $, le prix récompense une œuvre de fiction canadienne de langue anglaise (produite ou traduite dans cette langue). Cette année, Suzette Mayr a remporté les grands honneurs grâce à son roman The Sleeping Car Porter. L’intrigue, qui se déroule en 1929, suit un porteur de bagages afro-canadien à l’homosexualité refoulée qui rêve de devenir dentiste tout en travaillant à bord d’un train qui sillonne le pays.

Atwood Gibson Writers’ Trust 

Autre récompense qui vaut au gagnant une bourse appréciable (60 000 $), le prix Atwood Gibson Writers’ Trust (anciennement connu sous le nom de Rogers Writers’ Trust et rebaptisé en hommage au couple cofondateur du prix, l’écrivaine Margaret Atwood et son conjoint, l’écrivain Graeme Gibson) est remis annuellement par l’organisme caritatif Writers’ Trust of Canada à l’auteur d’une œuvre de fiction canadienne (roman ou recueil de nouvelles). Le roman Some Hellish, de Nicholas Herring, originaire de l’Île-du-Prince-Édouard, a séduit le jury cette année. Le livre met en scène un pêcheur de homards ayant frôlé la mort pendant un voyage en mer, ce qui précipite des remises en question existentielles. 

En France

La saison des prix littéraires, en France, est toujours très médiatisée et occupe l’attention du public durant tout l’automne. L’une des très belles surprises a été l’annonce de l’attribution du prix Nobel de littérature à la grande écrivaine Annie Ernaux, dont l’œuvre autobiographique fait la preuve que l’intime rejoint le politique.

Parmi d’autres, trois œuvres ont particulièrement retenu l’attention. D’abord, le roman lauréat du prix Goncourt, Vivre vite, de Brigitte Giraud, une œuvre autobiographique autour de la mort de son mari dans un accident de moto. Aussi Les abeilles grises, de l’écrivain ukrainien Andreï Kourkov, qui a remporté le prix Médicis étranger. Sans oublier Le mage du Kremlin, de Giuliano Da Empoli, lauréat du Grand Prix de l’Académie française. Les sujets de ces deux dernières œuvres (conflit en Ukraine et pouvoir russe) touchent l’actualité troublante des derniers mois.

Enfin, soulignons les distinctions remises en France à des œuvres québécoises : le recueil de poésie Disparaître de Denise Desautels a remporté le prix Apollinaire, et le roman Les filles bleues de l’été de Mikella Nicol, publié au Québec en 2014 mais à l’automne 2022 en France, a reçu le prix Voltaire.

Les autres prix littéraires français :

Dans le monde anglo-saxon

Auréolés de prestige et fortement médiatisés, les honneurs accordés par des organismes de pays de tradition anglo-saxonne sont bien présents dans la valse des prix littéraires. La plus prisée des distinctions littéraires décernées au Royaume-Uni, le Booker Prize for Fiction, célèbre l’excellence d’un roman original publié en anglais. L’auteur sri-lankais Shehan Karunatilaka a été retenu cette année pour son roman The Seven Moons of Maali Almeida, une satire se déroulant à l’époque de la guerre civile qui a déchiré son pays durant plusieurs décennies. Le pendant international du Booker rend quant à lui hommage à une œuvre publiée au Royaume-Uni dans sa traduction anglaise. L’œuvre lauréate, Tomb of Sand de Geetanjali Shree, paraîtra en traduction anglaise en janvier au Canada. 

Prix britannique dont le nom a varié au fil du temps et au gré des organismes subventionnaires, le Women’s Prize for Fiction récompense un roman de langue anglaise écrit par une femme, peu importe son pays d’origine. C’est le roman The Book of Form and Emptiness de l’autrice canado-américaine Ruth Ozeki qui a été sélectionné en 2022. Enfin, les National Book Awards sont un ensemble de prix reconnaissant l’excellence dans la littérature produite aux États-Unis. 

  • National Book Award, fiction (adultes) : The Rabbit Hutch, Tess Gunty 
  • National Book Award, fiction (jeunes adultes) : All my rage, Sabaa Tahir 

L’écriture de genre

Plusieurs prix soulignent la richesse et la qualité des littératures de genre, dont les littératures de l’imaginaire et les romans policiers. Cet automne au Québec, le roman Highlands de Fanie Demeule, dont l’action se situe dans les landes mystérieuses des Highlands en Écosse, a remporté le Prix des horizons imaginaires, décerné par un jury composé d’étudiantes et d’étudiants collégiaux et universitaires. Le prix Saint-Pacôme, remis en octobre au roman Secrets boréals d’Anna Raymonde Gazaille, qui se déroule aux limites de la forêt boréale, a contribué à mettre en valeur le meilleur du roman policier québécois.

La littérature de genre est également célébrée de belle manière hors Québec. Le prix Aurora, accordé par l'Association canadienne de la science-fiction et du fantastique, a été remis cette année à Fonda Lee (Jade Legacy), tandis que le prix Nebula a été attribué à P. Djèlí Clark pour le roman A Master of Djinn, élu l’œuvre de science-fiction ou de merveilleux la plus novatrice par les Science Fiction and Fantasy Writers of America. Le roman A Desolation Called Peace d’Arkady Martine s’est particulièrement démarqué cette année, valant à son autrice à la fois le prix Hugo et le prix Locus, décerné par le lectorat du magazine Locus, spécialisé dans la publication de science-fiction, de merveilleux et d'horreur. 

Quelques prix remis plus tôt en 2022

Plusieurs prix littéraires importants sont aussi remis plus tôt dans l’année, au Québec comme ailleurs, dont les très populaires Prix des libraires du Québec, Prix littéraire des collégiens et, aux États-Unis, le prix Pulitzer. Soulignons également le Grand Master Award, décerné tous les deux ans par l’association des Crime Writers of Canada à un auteur ou à une autrice de romans policiers pour le rayonnement exceptionnel de son œuvre. C’est la prolifique et immensément populaire Louise Penny qui a été honorée en 2022. Voici quelques-uns des romans et des récits qui se sont démarqués lors des quelques remises de prix printanières de 2022.