Explorez les premiers pas du Festival international de la poésie, en 1985, alors que la poésie trouve refuge à Trois-Rivières. Découvrez comment cet événement a transformé la ville en destination incontournable pour les poètes et les amateurs de poésie du monde entier.

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Le Festival international de la poésie se déroule chaque automne à Trois-Rivières. Une multitude d’activités s’y déroulent pendant plus d’une semaine, allant des lectures de poèmes aux ateliers d’écriture.
1985 : une première édition réussie
À l’automne 1985, le Festival national de la poésie voit le jour à Trois-Rivières. L’idée vient de Gaston Bellemare, Jean-Marc Gauthier, Louise Gravel et Marguerite Veilleux, de la Fondation Les Forges. Le but : faire connaître et reconnaître la poésie et ses auteurs à travers un événement capable de susciter l’intérêt du grand public. Gaston Bellemare présidera ce premier festival, ainsi que toutes les éditions suivantes.
Lors de cette édition initiale, Félix Leclerc, grand chansonnier du Québec et invité d’honneur, déclare dans un discours presque prophétique que Trois-Rivières est la « capitale de la poésie ».
Ayant pour thème l’œuvre du poète Gatien Lapointe, cofondateur des Écrits des Forges et auteur du recueil Ode au Saint-Laurent, la première édition du Festival attire 80 poètes du Québec et 5000 participants! On y remet le premier Grand Prix de la poésie de la Fondation Les Forges à Michel Beaulieu pour son recueil Kaléidoscope.
1986 : la Passionaria du Québec au Festival
N’ayant pas oublié les mots de Félix Leclerc, Gaston Bellemare souhaite faire du Festival un événement touristique. La deuxième édition sera donc celle de l’ouverture à d’autres formes d’art. Lucien Francoeur anime une soirée d’humour et de poésie, Monique Leyrac chante Nelligan, et Pauline Julien, la « Passionaria du Québec », récite les poètes d’ici accompagnée à l’orgue par un musicien, pour le plus grand plaisir des mélomanes et des amateurs de poésie. La photo et la peinture sont également à l’honneur dans plusieurs expositions à travers la ville.
1987 : le récital de Vigneault
Après deux éditions, Gaston Bellemare, le principal responsable, est clair : il ne veut pas que le Festival soit seulement un événement régional. Il trouve que l’édition de 1987, avec le grand Gilles Vigneault comme tête d’affiche, atteint cet objectif. Les trois soirs de récital offerts par Vigneault sont le clou du Festival. Le poète dira :
« Ces trois récitals, dans un cadre qui ressemble d’assez près à ce que nous allons faire ensuite à Paris, cela me passionne. C’est plein de sens. Trois soirs de suite, dans le cadre intimiste d’une salle où tout le monde se connaît, c’est le partage, au sens le plus fort du mot, avec les gens qui ont eu l’idée de ce festival, qui l’ont bâti, qui en ont fait quelque chose d’exceptionnel. Me plonger dans cette atmosphère de fête, me sentir désiré à ce point, c’est le plus beau témoignage que puissent m’offrir mes amis de la Mauricie. »
Cette troisième édition attirera plus de 12 000 personnes.
1988 : le Festival prend son envol
La popularité du Festival national de la poésie continue de gagner de l’ampleur d’une année à l’autre. En 1988, plus de 31 poètes participent à la Grande Soirée de la poésie, tenue un samedi d’octobre devant un public attentif. Celle-ci est également retransmise en direct à la radio partout au pays, sur les ondes de Radio-Canada.
L’événement attire des poètes francophones de toutes les origines : des poètes d’Égypte, du Mexique et d’Haïti se joignent à leurs collègues du Québec.
Le chroniqueur Rolland Paillé, du journal Le Nouvelliste, affirme à la suite de la quatrième édition que le Festival « a pris son envol ». Dans son article du 19 octobre 1988, il remarque le progrès réalisé depuis les débuts : « Après une quatrième édition sans tache, et au cours de laquelle on pouvait noter un progrès remarquable au chapitre de la programmation et de la qualité des participants, le festival est vraiment là pour y demeurer. »
Le maire de Trois-Rivières de l’époque, Gilles Beaudoin, reconnaît également le succès du Festival et les bénéfices d’un tel événement pour la ville. Il réitère son appui aux organisateurs et dit prendre en considération le souhait de Gaston Bellemare d’« habiller » la ville de façon permanente.
1989 : un festival international
En 1989, en raison de la présence de poètes internationaux aux dernières éditions, et pour s’aligner avec le souhait des organisateurs de positionner le Festival comme un attrait touristique, un changement s’opère. Le Festival national de la poésie devient officiellement le Festival international de la poésie de Trois-Rivières. Un nombre record de poètes en provenance de plusieurs pays y participent.
1990 : « La poésie a une ville et c’est Trois-Rivières! »
C’est en 1990, lors de la sixième édition, qu’on comprend l’ampleur du changement mis en place un an plus tôt. La couverture médiatique est beaucoup plus importante. Le Festival international de la poésie de Trois-Rivières fait honneur à son nouveau nom.
En effet, des médias de Jonquière, de Sherbrooke, de Québec, de Montréal et même d’autres pays couvrent l’événement. Reportages, entrevues et publicités rejoignent les gens en dehors de la région de Trois-Rivières. Et c’est une centaine de poètes des quatre coins du monde qui participent à cette édition. Le critique littéraire Jean Royer, dans Le Devoir du 13 octobre 1990, affirme : « En somme, la poésie a une ville et c’est Trois-Rivières! »
Le chroniqueur décrit également le public du Festival : « Cette participation, elle est variée et regroupe tous les âges de la population, des vieilles dames amantes de la poésie jusqu’aux jeunes rockers cherchant à faire bouger les formes du langage. » Plus de 15 000 amateurs de poésie de tous les horizons participent aux activités de cette sixième édition.
Un festival bien ancré dans le paysage
Les premières années ont été déterminantes pour l’implantation du Festival international de la poésie dans le paysage trifluvien. Cependant, ce n’était qu’un début : le succès de l’événement ne cesse de grandir. Le souhait de Gaston Bellemare s’est réalisé, et la poésie est maintenant bien visible à Trois-Rivières même en dehors du Festival. En 1994, un monument au poète inconnu a été érigé sur la place de l’Hôtel-de-Ville. Plus de 400 plaques de poésie habillent également les bâtiments du centre-ville et, chaque automne, une corde à linge de poèmes apparaît en plein cœur de la ville.
La 40e édition du Festival international de la poésie sera la dernière pour Gaston Bellemare, qui tire sa révérence après quatre décennies de dévouement pour la poésie.
Pour aller plus loin :
De nombreux fonds d’archives conservés par BAnQ témoignent de l’importance du Festival.
Aux Archives nationales à Trois-Rivières :
Fonds Alphonse Piché (P19)
Fonds Gatien Lapointe (P136)
Fonds les Écrits des Forges (P137)
Aux Archives nationales à Montréal :
Fonds Claude Beausoleil (P901)
Fonds Pierre Nepveu (P874)
Sources consultées :
Le Devoir, 13 octobre 1990. https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/2760251?docsearchtext=festival%20international%20%20po%C3%A9sie%20trois-rivi%C3%A8res
Le Nouvelliste, 10 octobre 1988. https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/3251644
M. Cochard, « Trois-Rivières : tatouée poésie », Continuité, no 137, 2013, p. 39-41. https://www.erudit.org/fr/revues/continuite/2013-n137-continuite0748/69664ac.pdf
Fonds Fondation les Forges inc. https://advitam.banq.qc.ca/notice/423288