Salut Francoeur!

Poète visionnaire et chanteur du mythique groupe Aut’Chose, Lucien Francoeur est l’une des figures marquantes de la contre-culture québécoise des années 1970 et 1980. Celui qu’on surnomme le « Freak de Montréal » a marqué notre imaginaire collectif à jamais. Retour en quatre temps sur sa truculente carrière.

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1. Aut'Chose, c'était quelque chose

Lucien Francoeur se révèle comme chanteur et parolier au sein d’Aut’Chose, formation phare de la scène musicale québécoise des années 1970. Dépositaire d’un rock classique ascendant Rolling Stones, le groupe emprunte également aux Doors et, respectueux des pionniers, n’hésite pas à reprendre une ballade surannée comme Blue jeans sur la plage. Les textes hauts en couleur de Francoeur sont à la fois hallucinés et hilarants. En spectacle, le public peut apprécier (ou non, c’est selon) les poses du chanteur, véritable bête de scène (cet article de La Presse en témoigne). Disons qu’Aut’Chose assume pleinement son nom… Plus tard, Francoeur poursuivra une carrière solo, moins marquante certes, mais ponctuée d’au moins un tube, Le Rap-à-Billy, véritable ver d’oreille. 

2. Lucien et Émile

Il y a Francœur le rocker, mais il y a aussi Francœur le versificateur. Auteur d’un bon nombre de recueils, l’artiste se considère d’abord comme un poète. Il cultive une langue originale, crue et savante, brillamment québécoise, également tributaire de la mère France (Rimbaud, Verlaine) et de certaines figures mythiques de l’Amérique (Jack Kerouac, Jim Morrison…). En 1983, il reçoit le Prix Émile-Nelligan pour Rockers sanctifiés. Une récompense qui fait la joie de Francœur, grand admirateur de l’auteur du Vaisseau d’or. Sa distinction lui est remise à la Bibliothèque nationale du Québec, rue Saint-Denis à Montréal.

3. Retour en classe

Dans une autre de ses vies, Lucien Francoeur sera professeur de cégep. Sa matière : la littérature, évidemment. Dans cet article du Devoir paru en 1986, il témoigne de son expérience : « Depuis trois ans que j’enseigne, je pense avoir réussi ce que je m’étais proposé : transmettre des connaissances tout en essayant de ne jamais m’éloigner de mes préoccupations d’écrivain. J’ai voulu faire lire aux étudiants les auteurs qui m’avaient transformé et qui m’avaient habité depuis mon adolescence : Rimbaud, Baudelaire, Genet, Artaud, Lautréamont, Breton, Sartre, Miron, Brossard, Kerouac, Burroughs, Deleuze, Barthes, et tant d’autres. J’ai voulu faire vivre aux étudiants une aventure en littérature, avec un écrivain comme éclaireur. Et je n’ai jamais hésité à mettre au programme des œuvres dites difficiles, voire illisibles. »

4. Radio Lucien

En 1990, Lucien se retrouve derrière un micro de la station montréalaise CKOI. Son émission quotidienne est un hit surprise. La Presse décortique le phénomène : « Francoeur ne se possède plus. Le Francoeur Show qu'anime le poète de 18 h à 21 h du lundi au vendredi, est un succès qui est en train de changer sa vie. Et qui changera peut-être la façon de faire de la radio rock. […] Il a des invités. Il fait tourner de vieilles chansons d'Antoine et de Polnareff. Quand il joue Des fleurs pour Salinger d'Indochine, il explique qui était ce romancier américain dont l'assassin de Lennon gardait le best-seller Catcher in the Rye (L'attrape cœur en français) sur sa table de nuit. Et Francoeur dit tout ça de sa voix normale, pas de celle qu'empruntent les disc-jockeys cool de la radio FM. »

À emprunter à la Grande Bibliothèque